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Du nouveau sur les photos d'ateliers d'artistes d'Edmond Bénard
Mis à jour le 12 janvier 2017
Les trésors de l'INHA
Auteur : Jérôme Delatour
Pendant le week-end Portes ouvertes du site Richelieu, nous vous proposons d’explorer les lieux historiques, désormais rénovés, qui accueillent notre bibliothèque, mais aussi les départements spécialisés de la Bibliothèque nationale de France, ainsi que la bibliothèque de l’École nationale des chartes.
Lors de votre parcours à travers la zone rénovée du site Richelieu, vous pourrez découvrir quelques œuvres représentatives de nos fonds patrimoniaux, exposées en salle Labrouste. Des bibliothécaires seront présents pour commenter ces documents et répondre à toutes vos questions sur notre nouvelle bibliothèque.
Après un premier billet consacré au portrait de Jacques Doucet par son ami Pierre Gatier, et un deuxième sur des estampes d’ornement du XVIe siècle, découvrez maintenant un album photographique acquis par la bibliothèque en 2014.
Un album de photographies par Edmond Bénard (1838-1907) vous sera présenté (cote 4 Phot 55). Les pages exposées représentent les ateliers du sculpteur Alexandre Falguière (1831-1900) et du peintre Henri Gervex (1852-1929). Il s’agit de photographies sur papier albuminé, datant pour l’une de 1886 et, pour l’autre, d’une date indéterminée avant 1889
Edmond Bénard est un photographe qui n’est guère connu que pour ses photographies d’ateliers d’artistes. De 1884 à 1894 environ, il entreprit de photographier systématiquement les ateliers des artistes exposant au Salon : hommes, femmes, français et étrangers, peintres et sculpteurs. Ces vues étaient censées permettre au spectateur de faire irruption dans l’intimité de l’artiste. En vérité, elles se révèlent tout aussi fabriquées que l’art pratiqué par leurs modèles, artistes académiques pour la plupart.
En effet, chaque atelier a fait l’objet d’une série de photographies, généralement prises le même jour, au cours duquel le photographe a réagencé les lieux à sa guise, tirant ici un tapis, décrochant un tableau là, poussant les plantes vertes, manipulant l’artiste même, le plus souvent présent sur l’image, selon un catalogue de poses stéréotypées : tantôt il joue du piano, tantôt il feint de peindre un tableau achevé, lit le journal, converse avec un ami, est allongé sur un sofa… Le même scénario se répète d’atelier en atelier, et l’on s’étonne de la complaisance de ces artistes parfois célèbres, comme ici Falguière et Gervex, envers un personnage aussi mineur que l’était alors un photographe.
Edmond Bénard, Portrait du sculpteur Alexandre Falguière, photographie sur papier albuminé, 1886, bibliothèque de l’INHA, 4 Phot 55, f. 12v. Cliché INHA
Ces photographies savamment construites constituent cependant un document sociologique de première main, où se lit à la fois la condition de l’artiste et son statut de modèle auprès de la bourgeoisie. À cette époque en effet, beaucoup d’ateliers étaient ouverts à la visite, et le bourgeois allait y puiser des idées pour encanailler la décoration de ses appartements. D’ailleurs, certaines de ces images étaient reproduites dans les revues d’architecture et de décoration intérieure, et certains artistes exerçaient une activité parallèle de décorateur.
Edmond Bénard, Portrait du peintre Henri Gervex, photographie sur papier albuminé, avant 1889, bibliothèque de l’INHA, 4 Phot 55, f. 13. Cliché INHA
En savoir plus
La bibliothèque conserve deux albums de vues d’ateliers par Bénard. Celui-ci a été acquis en 2014 ; l’autre, acheté en 1958, a fait l’objet d’une numérisation, consultable sur la bibliothèque numérique de l’INHA, et d’une édition en fac-similé (Portraits d’ateliers : un album de photographies fin de siècle, ELLUG, 2013).
Jérôme Delatour, service du patrimoine