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Entrer dans le paysage
Mis à jour le 17 juillet 2024Vademecum Histoire des arts | Collège
L’historienne de l’art Colette Garraud, dans le champ de sa discipline, a construit une histoire de l’idée de nature dans l’art contemporain qui donne des clés de lecture et impulse le goût de prospecter à son tour. Elle aborde les enjeux du Land Art et opère un classement des artistes selon l’idée génératrice de leur travail, « la réflexion sur l’espace, le corps comme outil, la rêverie fusionnelle, l’expérience du temps ou la sculpture ».
La peinture de paysage (…) a aujourd’hui, sinon complètement disparu, du moins largement [cédé] le pas, pour l’essentiel, à la sculpture, dans un sens élargi du terme, aux installations et aux environnements, aux actions engageant le corps de l’artiste, à la photographie, et à toutes les combinaisons possibles entre ces formes d’art. (…) À la fin des années soixante, l’esprit de révolte de la jeune génération manifesté partout se traduit plus particulièrement dans une mise en cause radicale du système marchand et des circuits traditionnels atelier-musée-galerie. […] Si la méditation romantique, la retraite contemplative, la nostalgie d’une douceur pastorale, ou encore la préoccupation écologique animent sans aucun doute certains (…) le contact avec la nature sera quelquefois pensé en termes non pas d’harmonie, de nouvelle alliance, mais de rapports de force. (…) Bien sûr, il a fallu dénommer ces formes d’art inconnues, au demeurant très diverses. On voit donc apparaître un grand nombre d’expressions nouvelles : Land Art, Earth Art, Earthworks, Environmental Art, Outdoors Art, Land projects, Projects on site […] Les parcs de sculptures, créés à l’initiative d’une collectivité, d’une institution muséale ou d’un mécène (…) s’orientent vers une articulation entre art et nature de plus en plus serrée et signifiante. Dans le domaine de Kerguéhennec, les emplacements de telle sculpture de granite bleu d’Ulrich Ruckriem, mystérieuse comme un vestige de civilisation celtique, au détour d’une allée, de telle structure légère de Zorio suspendue dans les arbres (…) répondent à des exigences de l’ordre du sens et non plus d’un simple arrangement harmonieux. Ces œuvres, au demeurant, voisinent avec celles de Penone ou de Richard Long.
Colette Garaud
Éclairage
Artiste randonneur, Richard Long pratique le paysage par la marche. Il définit son itinéraire au préalable sur une carte, étudie la topographie et la configuration des lieux, ce qui lui permet de cerner le territoire. Il prélève, collecte puis accumule des matériaux naturels qu’il pose à même le sol, trouvés sur les lieux de ses déplacements, mis en scène selon des formes simples et symboliques comme le cercle, la spirale, la croix. Cet art de faire le paysage s’expose aussi hors du circuit traditionnel de l’art, dans des parcs dits de sculpture, comme celui du domaine de Kerguéhennec dans le Morbihan. Ses œuvres deviennent alors une invitation à changer notre point de vue sur l’environnement. L’artiste anglais définit ainsi son travail : « Mes sculptures en plein air sont des lieux. Le matériau et l’idée appartiennent au lieu ; sculptures et lieu sont une seule et même chose. Le lieu s’étend aussi loin que l’œil peut voir, à partir de la sculpture. L’endroit de la sculpture est trouvé en marchant. Certaines de mes œuvres sont une succession de lieux précis tout au long d’une marche. »
Ressources :
Les ressources du Domaine de Kerguéhennec (département du Morbihan)
Un dossier pédagogique de l’exposition Pendant que les champs brûlent
Ouvertures
La tapisserie monumentale de l’artiste contemporaine Britta Marakatt-Labba intitulée History (2003 2007) est une œuvre indispensable pour comprendre comment les artistes samis forgent des représentations du paysage qui leur sont propres, le lieu d’une mise en scène d’une relation spirituelle avec la terre et les ressources traditionnelles. Par ce paysage, traversé par la file d’attelages qui lie rennes et hommes pendant les déplacements et les migrations saisonnières, l’artiste réussit à transmettre une vision sensible des terres enneigées. Elle forge des récits de création en insistant sur l’interdépendance entre les humains et la nature. Entrer dans la forêt pour mieux en sortir et si possible victorieux. Du Moyen Âge à la Renaissance, la forêt, lieu terrifiant, de rencontres et d’épreuves, se traverse. Alors qu’elle est peu décrite dans la légende arthurienne, les enluminures, procédé graphique autant que didactique, donnent à voir ce lieu sauvage, domaine des enchantements. Les miniaturistes soulignent alors sa densité, les arbres envahissent toute la composition de l’image, les couleurs sombres évoquent la perte de repères. Dans les peintures en pleine page des Très Riches Heures du duc de Berry (xve siècle), les frères Limbourg représentent une forêt désormais domestiquée, cadre et décor des divertissements de la noblesse. Dans les miniatures du mois de mai, les tours et les flèches gothiques dépassent la canopée de la forêt, à l’arrière plan de l’image, qui semble ainsi maîtrisée et encadrée.
Ressources :
Une notice sur les artistes samis présents à la Dokumenta 14
Une exposition virtuelle multimédia L’esprit des lieux sur la légende arthurienne
Le dossier pédagogique de l’exposition La forêt magique
Un article L’imaginaire européen de la forêt. Des marges à la perte de Benoît Dauvergne
Pistes pédagogiques
1 Faire classe dehors. Aller dans les environs immédiats de l’école pour y mener des projets de découverte du patrimoine de proximité à l’aide d’une carte. Les temps de marche, de collecte, d’observation puis de restitution sont autant d’entrées sensibles dans le paysage.
Ressources :
La lettre Édunum en histoire des arts d’avril 2022 sur le thème Faire classe dehors
2 Envisager un travail autour de l’arbre et ses représentations. Avec une série de mots donnés aux élèves relevant du champ lexical de l’organique, proposer plusieurs interprétations descriptives.
Ressource : Un dossier de presse Giuseppe Penone. Sève et Pensée
3 Envisager un débat et des recherches sur l’actualité de l’architecture autour des notions de durabilité et d’urgence climatique. La revégétalisation des cours d’école peut servir de base de discussion.
4 Découvrir la notion de paysage sonore et les caractéristiques d’un paysage lointain, celui de l’Amazonie guyanaise, par l’écoute d’un document éco-acoustique. Enregistrer un paysage sonore de proximité. Réaliser une capsule sonore d’un paysage métis.
Ressource : La restitution virtuelle et numérique des Savoirs autochtones wayana et apalaï (Guyane)
Référence au programme de cycle 4
Histoire des arts
Thématique 8 Les arts à l’ère de la consommation de masse (de 1945 à nos jours Arts, énergies, climatologie et développement durable
Arts plastiques
La matérialité de l’œuvre ; l’objet et l’œuvre Les qualités physiques des matériaux
Français
L’être humain est-il maître de la nature ? Interroger le rapport de l’être humain à la nature à partir de textes et d’images empruntés aux représentations de la nature et de sa domestication à diverses époques, en relation avec l’histoire des arts, et saisir les retournements amorcés au XIXe siècle et prolongés à notre époque
Géographie
Thème 3 L’environnement, du local au planétaire
Le changement climatique et ses principaux effets géographiques régionaux
Sciences de la vie et de la terre
La planète Terre, l’environnement et l’action humaine – Les phénomènes naturels : risques et enjeux pour l’être humain.
Compétences en histoire des arts
Construire un exposé de quelques minutes sur un petit ensemble d’œuvres ou une problématique artistique
Attendus de fin de cycle en histoire des arts
Rendre compte en termes personnels d’une expérience artistique vécue, soit par la pratique soit comme spectateur
Connaissances et compétences associées en histoire des arts
Amorcer à l’aide de ces éléments, un discours critique
Domaine du socle commun de connaissances, de compétences et de culture
Domaine 4 Les systèmes naturels et les systèmes techniques