Dynamiques et configurations corporellesCycle « Corps troublants. Images et imaginaires dans la première modernité »

Cette rencontre Dynamiques et configurations corporelles est la première du cycle Corps troublants. Images et imaginaires dans la première modernitéorganisé par Francesca Alberti (CESR /Université François-Rabelais, Tours) et Antonella Fenech Kroke (Centre André Chastel/CNRS). Le workshop a reçu le soutien du GIS Humanités.

Corps renversés, membres contorsionnés, visages grimaçants, organes et orifices exhibés, émanations et bruits incontrôlés, autant de manifestations corporelles qui perturbent et créent un sentiment de malaise, une anxiété. Qu’ est-ce qui cause ce trouble ? D’ où vient-il ? A-t-il toujours été de la même nature à travers le temps ? Est-il ressenti de la même manière dans d’autres cultures que la nôtre ?

Mises à distance ou au contraire exacerbées, voire sublimées dans les images par les processus de représentation, ces expressions troublantes du corps – d’un corps toutefois reconnu comme « semblable » au sien – émergent souvent du contraste avec une conception idéalisée du corps, à la fois corps-objet-organique et corps-sujet-intentionnel (Marzano), pensé comme idée historique et comme acteur de toutes les utopies, constamment refaçonné et transfiguré par les constructions culturelles des sociétés (Foucault). Les images se chargent alors d’une agressivité, d’un pouvoir de provocation, d’une tonalité obscène, risible ; elles deviennent parfois elles-mêmes déroutantes, voire dégoûtantes en jouant sur des configurations, des gestes, des postures et des mouvements « inacceptables » (in-décents, in-tenables, in-sensés, non-naturels, a-normaux, etc.) du corps.
Par ailleurs, le morcellement, la dispersion, la perméabilité et la porosité du corps, opposés à la représentation de son intégrité idéale et univoque, ont pu susciter une aversion et un trouble.

Au-delà de l’inquiétante étrangeté que provoquent l’altérité, la difformité, l’hybridité ou encore la maladie du corps – toutes problématiques qui ont fait, depuis quelques années, l’objet de nombreuses recherches –, ces workshops invitent à penser de quelle manière la culture visuelle de la première modernité élabore des configurations par lesquelles le corps « semblable » devient troublant, à vérifier comment le regard prémoderne perçoit ce trouble et, enfin, à se demander si ce regard historiquement défini diffère du nôtre.
Il s’agira ainsi de réfléchir à la perception à la fois de ce qu’est un corps troublant dans des contextes culturels, sociaux et religieux spécifiques (Europe, Nouveau Monde…), et aussi à la construction et à la réception de dispositifs visuels et formels qui transforment un corps « semblable » en un objet déconcertant jusqu’à en devenir menaçant. Trouble et menace viendraient-ils de l’altération d’imaginaires et de normes culturelles inscrites dans le corps même ? Ou encore de la perversion des critères esthétiques et éthico-moraux de la représentation ?

Programme

10h-13h

  • Introduction
    Francesca Alberti et Antonella Fenech Kroke
  • Images troublées et corps troublants dans la série des Péchés (1557-1558) de Pieter BruegelMichel Weemans (École nationale supérieure des beaux-arts, Bourges)
  • Vues déroutantes et comiques du postérieur
    Francesca Alberti (CESR/Université François-Rabelais, Tours)
  • Le lapidaire de Montaigne : « subjection graveleuse » et corps excrémentiel
    Dominique Brancher (Université de Bâle)
  • Imiter, détourner, hybrider : le corps de l’image polémique
    Martial Guédron (Université de Strasbourg)

14h30-18h                                                                                     

  • « Crocifissi scontrafatti » : configurations troublantes du crucifix et géographies du regard dans l’Europe prémoderne
    Chiara Franceschini (Ludwig-Maximilians-Universität München)
  • Un cas moderne d’agalmatophilie : le trouble érotique que suscite l’Aurore de Michel-Ange
    Lise Wajeman (Université Aix-Marseille)
  • Clitoridis excrescentia, à savoir comment retrancher l’inutile développement
    Concetta Pennuto (CESR/Université François-Rabelais, Tours)
  • Gender fluidity and the Baroque gaze
    Harald Hendrix (Royal Netherlands Institute, Rome)
  • Répondants : Giovanni Careri (CEHTA/EHESS) et Antonella Fenech Kroke (Centre André Chastel/CNRS)

Pour en savoir plus

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Informations pratiques

19 Janvier 2018 - 10H-18H

Galerie Colbert, salle Ingres
Centre André Chastel
2 rue Vivienne
75002 Paris