L’étude et la restauration des vestiges de la chapelle de Commynes au musée du Louvre (2021-2025) : un moment d’observation privilégié pour la compréhension d’un décor disparu

La chapelle fondée par Philippe de Commynes dans l’église des Grands Augustins de Paris a très tôt été identifiée comme un jalon de l’art « 1500 » et un témoignage précoce de l’introduction en France des « décors arabesques » à l’italienne. Récupérés par Alexandre Lenoir pour son Musée des Monuments français, les éléments de la chapelle ont suivi des destins différents, entre le Louvre, Saint-Denis, Versailles et l’Ecole des Beaux-Arts, avant d’être réunis dans les salles du département des Sculptures en 1993. Au-delà de l’amélioration de l’état de présentation des sculptures, la restauration a été l’occasion d’approfondir notre compréhension de l’aspect d’origine de la chapelle, de sa signification et de sa datation.

Redécouverte du portail de la collégiale Notre-Dame de Thouars à la lumière du chantier

La restauration en cours du portail de la collégiale Notre-Dame de Thouars, fondée en 1510 par Louis II de la Trémouille et Gabrielle de Bourbon, a livré une quantité importante de données matérielles permettant le renouvellement des connaissances, tant du point de vue de la datation que de la conception. L’œuvre s’est révélée être le résultat d’un projet qui a évolué à plusieurs reprises au cours de son édification. Ces modifications ont causé des reprises et des dispositions inhabituelles, créant des contraintes de conservation et de restauration qui sont au cœur de la réflexion qui accompagnent les travaux actuels.

Préservation du patrimoine et défis techniques : la restauration de la fontaine des Innocents

La Fontaine des Innocents, œuvre majeure de la Renaissance en France, est l’un des monuments les plus emblématiques de Paris. Erigée au cœur du quartier des Halles à partir de 1548, elle a connu une histoire mouvementée. De fontaine dite « à boire » au XVIe siècle et donc conçue avec un écoulement réduit, en filet, uniquement destiné au ravitaillement en eau, elle a connu dès la fin du XVIIIe siècle des déplacements et des remontages successifs qui l’ont transformée en fontaine ornementale à visée décorative. Ces bouleversements, combinés aux effets des intempéries, de la pollution atmosphérique et de la corrosion des réseaux de fontainerie, ont engendré de multiples altérations. Son exceptionnel décor sculpté, exécuté par Jean Goujon et complété par Augustin Pajou, a fait de sa restauration, menée par le Département des Edifices cultuels et historiques (DECH) et la Conservation des Œuvres d’Art religieuses et civiles (COARC) de la Ville de Paris, l’objet d’une attention toute particulière. Avec l’appui d’un comité scientifique, cette restauration a débuté par une étude préalable en 2018, puis un chantier-test en 2022 et s’est achevée en juin 2024. Cette communication entend présenter les différentes étapes de ce travail ambitieux, qui a notamment conduit à déposer les cinq nymphes de Jean Goujon et à les remplacer par des copies afin de préserver les reliefs originaux.

La fontaine de Beaune-Semblançay : l’impossible restauration ?

Parmi les six fontaines publiques édifiées à Tours au début du XVIe siècle, seule subsiste aujourd’hui la fontaine dite de Beaune-Semblançay. Commandée en 1511 par Jacques de Beaune, trésorier de France, pour orner les abords de son hôtel particulier, elle fut réalisée en marbre de Gênes, avec un bassin en pierre de Volvic. Conséquence d’une histoire mouvementée, d’une exposition continuelle aux intempéries, d’une utilisation intensive et de réparations répétées, la fontaine est aujourd’hui dans un état de dégradation très avancé. Une nouvelle expertise conduite en 2024, centrée sur l’état sanitaire des sculptures et les conditions d’une restauration, permet d’envisager de nouvelles pistes d’intervention. L’exemple de la fontaine de Beaune-Semblançay pose plus largement la question de la restauration des fontaines en place, de leur maintien in situ et de leur éventuelle remise en eau.

Restaurer et étudier le tombeau de François II et de Marguerite de Foix

Après plusieurs années d’étude, la DRAC des Pays de la Loire a engagé en 2023 la restauration du tombeau de François II et Marguerite de Foix, ducs de Bretagne. La forte contamination des sculptures du registre inférieur par des sels solubles a nécessité le démontage complet du monument afin de dessaler les blocs. Pour la première fois depuis 1817, un accès complet aux parties constitutives est possible. Une opération d’archéologie préventive accompagne cette restauration. L’approche pluridisciplinaire permet, par le croisement des regards, de mieux comprendre les modalités de réalisation et de mise en œuvre de ce monument unique.

L’étude et la restauration de La Vierge et l’Enfant de Michel Colombe : une œuvre redécouverte

L’étude préalable à la restauration de La Vierge et l’Enfant de Michel Colombe par le C2RMF a mis en évidence son histoire matérielle très complexe, nécessitant la mise en place d’une méthode de travail mêlant étude historique, matérielle et intervention directe sur l’objet. Cette communication est l’occasion de présenter les étapes de ce travail, jalonné de tâtonnements, pour tenter de comprendre la mise en œuvre de la sculpture ainsi que ses différentes altérations. Une meilleure connaissance de la statue a permis de proposer un parti pris d’intervention raisonné, en collaboration avec le musée du Louvre et le comité scientifique de suivi de la restauration.

Cheminées voyageuses : le cas de la cheminée de Rouen au musée national de la Renaissance

La cheminée dite de Rouen, parce qu’elle provient d’une maison du quartier canonial de cette ville, ou de la Santa Casa, d’après le sujet qui orne son manteau, est l’une de ces œuvres « immeubles » devenues mobiles puisqu’elle connaît actuellement son troisième déplacement depuis sa création. D’abord acquise pour le musée de Cluny, où elle a été remontée et exposée à partir de 1883, elle a été à nouveau déposée dans les années 1950, puis laissée un quart de siècle en réserve, avant d’être présentée au château d’Ecouen en 1988. Des pathologies importantes de la pierre ont obligé à un nouveau démontage en juin 2022. L’étude de chacun de ces mouvements nous renseigne sur l’évolution des méthodes et des approches dans la restauration et la conservation.

La cheminée du château du Bosquet : restaurer et retrouver le sens d’une sculpture monumentale traumatisé

Bâtie et déjà transformée au XVIe siècle, démontée, plusieurs fois déplacée au XXe siècle où elle séjourne plusieurs décennies au musée des arts de Philadelphie, la cheminée monumentale du château du Bosquet (Saint-Martin-d’Ardèche) est aujourd’hui démontée en 72 blocs dans des états de conservation variables. L’ambitieux projet conçu lors de son retour en France, visant à la remonter dans son lieu d’origine, appelle une opération de restauration complexe impliquant l’identification des blocs et la caractérisation du matériau et des altérations. Le parti pris de restauration, particulièrement délicat, sera dicté par les nombreuses strates historiques de l’objet, ayant chacune une valeur patrimoniale, mais aussi par l’hétérogénéité sanitaire et stylistique des blocs.

Renaissance d’un chef-d’œuvre oublié : la cheminée de l’Hôtel Cabu

En 2016, le réaménagement d’une salle de l’Hôtel Cabu, musée d’Histoire et d’Archéologie d’Orléans, a mis au jour une cheminée sculptée du XVIe siècle. Endommagée par les bombardements de la seconde guerre mondiale, sommairement étayée, elle avait été dissimulée derrière une cloison. Cette cheminée, provenant d’une autre habitation orléanaise, ne fut installée à Cabu qu’au XIXe siècle. Sa hotte, aux armoiries inconnues, encadrées de deux couples nus dont un seul subsiste, porte les vestiges d’une polychromie soignée sur un linteau orné de têtes de lions. Rubéfiée par le feu, fragmentée par la chaleur et par le gonflement de la rouille, elle était rongée par la cristallisation de sels solubles abondants qui menaçaient sa stabilité. Depuis fin 2023, une équipe de restaurateurs l’a démontée et a entrepris son dessalement par bains, travail délicat et toujours en cours, après l’extraction d’une trentaine de kilogrammes de sels.

La restauration de la polychromie originale des sculptures du chœur clos de la cathédrale d’Albi : un chantier de grande ampleur aux problématiques complexes

Fait rare en France, les sculptures du chœur des chanoines de la cathédrale d’Albi sont presque intégralement conservées. Si la période de leur réalisation a été diversement située entre le dernier quart du XVe siècle et le début du XVIe siècle, la commande en revient assurément à Louis Ier d’Amboise, évêque d’Albi de 1474 à 1503. En 2020, la DRAC a commandé une étude à un groupement de conservateurs-restaurateurs mandaté par Dominique Faunières, portant sur l’ensemble de la sculpture polychromée du chœur (hors sculptures au-dessus des stalles, déjà restaurées en 2014-2015). Les conclusions du rapport (2023) engagent à une grande prudence quant à la poursuite des restaurations. La DRAC s’est entourée depuis 2024 d’une AMO formée de deux conservatrices-restauratrices, et a confié une mission de maîtrise d’œuvre à l’architecte en chef des monuments historiques du Tarn pour engager en 2026 des travaux sur une petite partie du chœur, qui fera office de chantier « test ».

La restauration du tour de chœur de la cathédrale Notre-Dame de Chartres

Édifié à partir de 1514, le « tour de chœur » de Notre-Dame de Chartres est l’une des rares clôtures liturgiques conservées de nos jours. Entre 2015 et 2022, elle a bénéficié d’une restauration générale pour un montant de près de 2,5 millions d’euros financés par la DRAC Centre-Val de Loire, maître d’ouvrage, avec le mécénat exceptionnel de l’association des Amis de la cathédrale de Chartres. Grâce à cette restauration d’ampleur et aux études conduites par des conservateurs, restaurateurs et historiens de l’art, l’ouvrage se révèle de nouveau aux visiteurs comme l’une des créations majeures de la sculpture religieuse de la première moitié du XVIe siècle. Pour autant, au-delà de chantiers d’envergure, la préservation d’un tel ensemble nécessite un entretien régulier auxquels chacun doit rester attentif.

Étude préalable et recomposition d’un retable picard de la fin du XVIe siècle en bois polychromé, de la collection d’Alexandre Du Sommerard

Du 2 au 13 juin 2025, des élèves en conservation-restauration du patrimoine de l’École supérieure d’art et de design TALM-Tours et de l’Institut national du Patrimoine (INP) se sont associées pour la réalisation d’un chantier-école. Le chantier a eu lieu au château d’Écouen, sous la responsabilité de Damien Berné et de Guillaume Fonkenell, respectivement conservateurs du patrimoine au musée de Cluny – musée national du Moyen Âge et au musée national de la Renaissance.

Ce chantier a eu pour objectif l’étude de 55 pièces de retable conservées au musée de Cluny et au musée national de la Renaissance, relevant probablement d’une production du nord de la France (Amiens) dont le type général dérive des grands retables anversois, et sont datables de la seconde moitié du XVIe siècle.