Van Eck, Caroline Chercheuse invitée (mai-juin 2013)

Biographie Après des études en histoire de l'art (École du Louvre), philosophie et philologie classique (Université de Leyde), Caroline van Eck reçu son doctorat cum laude à l'Université d'Amsterdam, Faculté de Philosophie, avec une thèse sur la théorie architecturale au XIXe siècle. Ensuite, elle obtenu plusieurs bourses de recherche de la Fondation Néerlandaise de Recherche Scientifique (NWO), pour des projets de théorie architecturale de la Renaissance et les relations entre les arts et la rhétorique. Elle a enseigné l'esthétique et l'histoire de l'art et de l'architecture à Amsterdam et Groningue ; en 2006, elle été nommée à la chaire d'histoire et théorie de l'architecture de Leyde.

De 2006 à 2011, elle a dirigé une équipe multidisciplinaire intitulée ‘Art and Agency : Living Presence Response in Early Modern Italy', avec le support financier du programme VICI du NWO. Depuis 2011, elle a dirigé un autre programme NWO : ‘From Idols to Museum Pieces : Alternative Histories of Sculpture 1660-1815' en collaboration avec Maarten Delbeke (Gand/Leyde), Pascal Griener (Neuchâtel), Ian Jenkins (British Museum), Daniela Gallo (Grenoble) et Malcolm Baker (University of California at Riverside).

En 1997, elle a été Visiting Fellow au Warburg Institute à Londres ; en 2000, au Yale Centre for British Art à New Haven, et en 2003, à l'Université d'York. Elle a aussi été Visiting Professor aux universités d'Yale et de Gand.

Bibliographie 1. Classical Rhetoric and the Arts in Early Modern Europe. Cambridge : Cambridge University Press 2007.

2. Inigo Jones Reconstructs Stonehenge : Architectural History between Memory and Narration, Amsterdam : Architectura & Natura Press 2009.

3. Avec Stijn Bussels (réd.), The Arts, the Theatre and Theatricality in Early Modern Europe, numéro special d'Art History 32/2 (Spring 2010).

4. ‘Living Statues : Living Presence Response, Agency and the Sublime', Art History 33/4 (September 2010), pp. 642-660.

5. ‘1990-2010 : Vingt ans d'historiographie néerlandaise', Perspective 2010-11/4 : Les Pays-Bas, pp. 671-687.

6. ‘The Warburg Institute and Architectural History', Common Knowledge vol. 18/1 (2012), pp. 134-49.

7. ‘Note from the Field : Anthropomorphism', Art Bulletin vol. XCIV/1 (2012), pp. 16-18.

8. François Lemée et la statue de Louis XIV sur la Place des Victoires : les débuts d'une réflexion ethnographique et esthétique sur le fétichisme (Paris : Centre Allemand d'histoire de l'art/Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, 2012).

9. ‘Enargeia ou fétichisme : Le rejet de l'image vivante dans les discours sur l'art des années 1750', in : C. Michel et J. Lichtenstein (eds.), De la Quête des règles au discours sur les fins. Les mutations des discours sur l'art en France dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, Rome : Académie de France à Rome, 2012.

10. ‘Aby Warburg's Mnemosyne and the Life of Art', in U. Fleckner, I. Wenderholm and H. Ziegler (eds.), Bildmagie (Hamburg : Warburghaus 2012).

Projet de recherche La publication de la Geschichte der Kunst des Altertums de Johann Joachim Winckelmann en 1764 est généralement considérée comme la naissance de l'étude moderne et scientifique de la sculpture. Son succès a obscurci d'autres façons d'étudier l'histoire de la sculpture et de concevoir sa nature et son importance. Elles prenaient leurs origines dans les études antiquaires du suédois Figrelius, et des études sur les origines idolâtres de la sculpture de G. Borboni, Delle Statue (Rome 1661) et Francois Lemée, Traité des statues (Paris 1688). Les études ethnographiques du Président de Brosses (Du culte des dieux fétiches, Genève 1760), de Ottavien de Guasco (De l'usage des statues chez les anciens, Bruxelles 1768), et de J.A. Dulaure (Des cultes qui ont précédé et amené l'idolâtrie ou l'adoration des figures humaines, Paris 1805), établirent une historiographie de la sculpture très différente de celle de Winckelmann. Cette série d'études finit avec le livre d'Antoine –Chrysostome Quatremère de Quincy sur le Jupiter Olympien, publié en 1815. Ces auteurs ne considéraient pas cet art comme un des beaux-arts, et le premier but de leurs études ne fut pas de déterminer les mérites artistiques des œuvres. Par contre, ils cernaient les fonctions religieuses et politiques de la sculpture. Ils voulurent tous démontrer que les origines de cet art sont religieux, et que sa naissance est liée très étroitement à celle des sociétés primitives. Ils contribuèrent ainsi à une étude de la sculpture fondée sur un regard ethnographique, et non pas artistique qui présenta l'art classique comme l'idéal artistique pour le temps présent.

Dans la période 1790-1820 deux vecteurs se croisent : d'un part la naissance des musées d'antiquités et d'ethnographie, de l'autre la réflection ethnographique, politique et religieuse sur les origines de la sculpture et ses rôles dans la société. Ces vecteurs se croisent dans les fondations, autour de 1800, des premiers musées et collections publiques d'antiquité. Celui de Leyde, par exemple, fondé en 1818 fut le premier en Europe ; il devait réunir dans une même galerie les antiquités grecques, romaines, indiennes et indonésiennes. L'iniative est due pour une partie majeure au roi Louis Napoléon.

Jusqu'à présent, la naissance du Muséum Français, du musée du Louvre et du musée des Monuments français a été très bien étudiée. En revanche, les rapports entre des façons radicalement différentes d'étudier la sculpture, fondées sur la vision de Winckelmann ou sur une approche ethnographique, et entre la fondation des musées d'antiquités et des musées ethnographiques n'ont pas encore été l'objet d'une telle étude. C'est surtout le cas pour la période autour de 1800, quand l'étude ethnographique de la sculpture est encore dans ses premières phases et n'a pas encore reçu la consécration des chaires universitaires. C'est ce chassé-croisé entre histoire de l'art et ethnographie, musées d'antiquités grecques et romaines, et non-européennes que je voudrais étudier pendant un séjour à l'INHA.

Le nouveau projet vise donc, entre autres, à faire une analyse comparative des débats et prises de position historiques, esthétiques et ethnologiques vis à vis des origines de la sculpture tant européenne que mondiale, dans le musée d'Antiquités à Leyde et les collections de sculpture antique à Paris montrées autour de 1800, une période brève mais très formatrice dans le domaine culturel, pendant laquelle les Pays-Bas faisaient partie de l'Empire de Napoléon. Le séjour à l'INHA servirait à établir la bibliographie de sources primaires et secondaires, et surtout à étudier les débats à Paris à cette époque sur ces questions et à analyser l'évolution conduisant des cabinets de curiosités sous l'Ancien Régime à l'institution d'un musée d'ethnographie à Paris. Cette histoire a été étudiée du point de vue de l'ethnographie, surtout dans le contexte de l'histoire du musée de l'Homme et la fondation du musée du Quai Branly, mais pas sous l'angle des rapports entre ethnologie et histoire de la sculpture dans les décennies fondatrices autour de 1800.