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MONGEZ, Antoine
Mis à jour le 16 avril 2010(30 janvier 1747, Lyon – 31 juillet 1835, Paris)
Auteur(s) de la notice :
PRETI-HAMARD Monica
Profession ou activité principale
Administrateur des Monnaies
Autres activités
Membre du Tribunat, membre de l’Institut, érudit, numismate, archéologue, historien de l’art
Sujets d’étude
Iconographie ancienne, numismatique, histoire des techniques, histoire du vêtement, mathématiques, zoologie, chimie
Carrière
30 janvier 1747 : naissance à Lyon
1763 : noviciat, collège Saint-Irénée de Lyon ; entre dans l’ordre des chanoines réguliers de France de la congrégation de Sainte-Geneviève
1769 : soutient sa thèse en théologie à Paris, enseigne les mathématiques chez les génovéfains de Nanterre, puis la rhétorique à Sens
1777 : Histoire de Marguerite de Valois, dont le succès lui vaut sa nomination comme garde du cabinet d’antiques et d’histoire naturelle de l’abbaye Sainte-Geneviève de Paris
1780 : Mémoires sur différents sujets de littérature
1781 : Histoire de Persépolis, primée par l’Académie de Cassel
1783 : Mémoire sur les cygnes qui chantent ; mémoire Les Noms et les Attributs de Pluton et des divinités infernales, primé par l’Académie royale des inscriptions et belles-lettres
1785 : résidant libre de l’Académie
1786-1794 : Dictionnaire d’antiquités
1789 : Galerie de Florence (achevée en 1821)
1792 : proche de Girondins membre de la Commission des monuments, puis de la commission administrative des Monnaies ; le 9 juin, mariage civil avec Angélique Levol, dessinatrice et peintre
1793 : proche des Montagnards ; liens d’amitié avec David et Jean-Paul Marat ; 1er juillet second acte de mariage avec la même Angélique Levol
1796 : administrateur des Monnaies ; publication de Considérations sur les monnaies ; rattaché à la classe de littérature et des Beaux-Arts et président de la section des antiquités et monuments de l’Institut
1801 : membre du Tribunat pendant quelques mois, puis à nouveau administrateur des Monnaies, adapte le système du franc germinal à la République italienne
26 octobre 1814 : mariage religieux avec Angélique Mongez
1816 : radié de l’Institut
1818 : réélu à l’unanimité
1821 : Iconographie romaine (achevé en 1826)
1822 : organise la frappe des médailles en bronze
1827 : écarté de l’administration des Monnaies
1830 : réintégré dans ses fonctions
31 juillet 1835 : mort à Paris ; une notice sur sa vie est lue par M. Charles Walckenaer dans la séance de l’Académie des inscriptions et belles-lettres du 17 août 1849
Chevalier de la Légion d’honneur
Étude critique
Le nom d’Antoine Mongez est à peu près tombé dans l’oubli. Ni les cinq volumes de son Dictionnaire d’antiquités, ni la continuation et l’achèvement de la prestigieuse Iconographie ancienne d’Ennio Quirino Visconti, n’ont suffi à sauver sa mémoire. Ces deux monuments ne sont pourtant que les manifestations les plus apparentes d’une curiosité et d’une activité infatigables, servies par une érudition hors normes. Mieux que la longue liste de ses ouvrages publiés, le recueil de ses manuscrits en partie inédits et sa correspondance, conservés aux archives de l’Institut de France, permettent de mesurer l’ampleur de ses travaux. Spécialiste de l’Antiquité classique, iconographe, numismate, s’intéressant de près aux civilisations de l’Orient ancien comme à l’archéologie de la Gaule, à l’épigraphie, à l’histoire des mœurs, du vêtement et des techniques, commentateur avisé des œuvres de la Galerie de Florence, mais aussi curieux de grammaire, bon connaisseur de mathématiques, de zoologie comme de chimie, relisant les Bollandistes pour les traduire et en faire des extraits, sans s’interdire quelques incursions, moins austères, dans les coulisses de l’histoire des rois, Antoine Mongez accumula sur ces matières une somme de documents et de connaissances considérable. Cet amoncellement n’impressionne pas seulement par sa masse et sa variété : on y retrouve les promesses d’un grand œuvre demeuré en chantier, les éléments d’une synthèse inachevée, l’ébauche et les essais d’une méthode qui tentait d’associer les divers domaines dont Mongez avait fait l’étude. C’est que sa position et ses aptitudes le plaçaient à la croisée de diverses disciplines. Celles de l’érudition classique, celles de l’antiquaire qui subordonne les témoignages littéraires aux reliques matérielles, celles aussi des sciences naturelles qui le portaient à interroger les vestiges du passé dans leur réalité la plus concrète en adoptant les procédures expérimentales du physicien et du chimiste. Plusieurs traditions se juxtaposent en lui : érudition monastique (l’abbé de Montfaucon), science antiquaire (Johann Joachim Winckelmann, le comte de Caylus), nouvel esprit des grandes compilations des secondes Lumières (Encyclopédie méthodique de Charles-Joseph Panckoucke ou Origine de tous les cultes de Charles-François Dupuis), dans le contexte d’éclectisme anthropologique et de réappropriation de l’histoire ancienne qui caractérise l’époque révolutionnaire et post-révolutionnaire. Lorsqu’il s’agit d’ordonner le tout en une présentation d’ensemble, Mongez s’en tient au cadre hérité de l’Encyclopédie, même si les perspectives et les minuties de son érudition, le conduisant au point où cet héritage trouve sa limite, annoncent les nouveaux agencements d’une science archéologique alors en gestation. Autre point commun avec les Encyclopédistes, l’intérêt qu’il accorde à l’histoire des techniques et la volonté de répondre par leur étude aux besoins du siècle. Quand il s’attache à la description d’un procédé ancien, il omet rarement d’en indiquer les applications possibles. Ce numismate fit d’ailleurs carrière dans l’administration des monnaies. Dans le même esprit, l’historien de l’art échangeait volontiers avec les artistes, soit qu’il sollicitât leurs talents et leurs connaissances pratiques ou qu’en retour il les fit profiter de son savoir, proximité qu’illustrent notamment les travaux effectués en collaboration avec Angélique Mongez, son épouse.
Par ses origines, Mongez est issu de la bourgeoisie « à talents », il est d’Église par sa formation. Son père était un des premiers négociants de la ville de Lyon, son oncle Antoine, jésuite, membre de l’Académie de Lyon, historiographe ecclésiastique, puis censeur royal, a laissé plusieurs études littéraires et une tragédie de Titus. Du côté maternel, l’abbé Rozier avait acquis une solide notoriété avec son Journal de physique. L’un des frères de Mongez, Jean-André (1750-1788), minéralogiste, participa à l’expédition de Lapérouse et disparut dans le naufrage de l’Astrolabe. Quant au puîné, Louis-Antoine, il épousera en 1800 Jacqueline-Marguerite de Pierreclau, l’héroïne du Jocelyn d’Alphonse de Lamartine. À 16 ans, Mongez fait son noviciat pour entrer dans l’ordre des chanoines réguliers de France, dit de la congrégation de Sainte-Geneviève. Il prononce ses vœux et endosse sans beaucoup de conviction la soutane de serge blanche et le rochet de toile. Chez les génovéfains, au moins peut-il étancher sa soif de connaissances dans les domaines les plus divers, lettres, sciences naturelles, mathématiques, s’initier aux disciplines érudites et commencer à écrire. D’abord bibliothécaire de l’abbaye Saint-Jacques à Provins, il publie en 1777 une Histoire de Marguerite de Valois, bientôt suivie d’un recueil de Mémoires sur différents sujets de littérature (1780) qui contient ses premiers essais d’histoire ancienne. C’est qu’on lui avait confié entre-temps la garde du cabinet d’antiques et d’histoire naturelle de l’abbaye Sainte-Geneviève de Paris, au sein de ce qui était alors l’une des plus importantes bibliothèques d’Europe. Le cabinet (rattaché depuis à la Bibliothèque impériale) possédait un riche ensemble dont certaines pièces provenaient de la collection Pereisc. Mongez s’y adonne à la numismatique et dresse le catalogue manuscrit du cabinet des médailles, tout en poursuivant ses études de zoologie et de botanique. Prenant goût aux recherches croisées, il considérera souvent, par la suite, l’histoire des civilisations anciennes du point de vue des sciences naturelles. En 1783, son Mémoire sur les cygnes qui chantent attire l’attention et lui vaut l’honneur d’une polémique avec le comte de Buffon. La même année, il remporte le prix proposé par l’Académie des inscriptions et belles-lettres sur « les noms et les attributs de Pluton et des divinités infernales ». L’Académie voudrait se l’attacher, mais sa qualité de religieux l’empêchant d’assister régulièrement aux séances, il est admis comme académicien libre, un statut créé par ordonnance royale en 1785. C’est là qu’il va donner toute la mesure de son activité, particulièrement dans les décennies qui suivront la création de l’Institut.
En 1786, il entreprend la publication du Dictionnaire d’antiquités pour l’Encyclopédie méthodique de l’éditeur Panckoucke, en proposant d’élargir le plan d’un précédent projet qu’Antoine Court de Gébelin n’avait pu réaliser avant sa mort. L’ouvrage fut achevé en 1792 (un sixième tome, contenant le recueil des planches, porte la date 1804) et dans l’intervalle son auteur s’était rallié ardemment aux idées nouvelles. La Révolution lui avait d’ailleurs permis de quitter l’Église et d’épouser Angélique Levol, élève de Regnault puis de David, auquel Mongez allait se lier étroitement. Le Dictionnaire traite non seulement de l’art et de l’archéologie, mais aussi de l’histoire, des mœurs et de la mythologie des Anciens. En tête de l’ouvrage, Mongez rend hommage à ses devanciers, Caylus et surtout Winckelmann. Le premier l’a précédé dans l’attention aux techniques et l’analyse des composantes matérielles des œuvres antiques, le second lui a transmis sa conception du beau idéal et du développement historique de l’art ancien. En outre, parmi ses sources, Mongez prend soin de mentionner le système mytho-astronomique de Charles Dupuis dont il expose les théories à la fin du cinquième volume, dans la partie intitulée « Chronologie ». Le Dictionnaire mobilise aussi bien les sources historiques et littéraires que les témoignages figurés. Ceux-ci peuvent informer l’étude des mœurs, tandis que les documents écrits sont riches d’enseignements pour l’historien des techniques. Mongez traite tour à tour des usages des Grecs et des Égyptiens, de la numismatique, de l’art de la mosaïque (avec des incursions jusqu’à l’époque médiévale), des représentations de la mort chez les Anciens, du développement de la statuaire grecque, joignant des considérations sur l’emploi des matières et des procédés, sur la destination publique des œuvres replacées dans leur contexte urbain, ainsi que sur les pratiques de restauration des antiques, avec la recension et la localisation de toutes celles qu’il a pu repérer. Entre 1804 et 1811, paraîtront les livraisons d’un recueil de planches dessinées par Angélique Mongez et gravées sous la direction de Jacques Bouillard. Réunies dans un sixième tome de supplément du Dictionnaire (en trois volumes), ces gravures étaient destinées « à faciliter l’intelligence des auteurs anciens, et à procurer aux artistes les moyens de peindre avec vérité les anciens peuples. ». Un volume de textes explicatifs, introduisait deux volumes de 380 planches, reproduisant « tous les objets qui peuvent entrer dans les compositions relatives aux peuples anciens connus par des monuments » et notamment « tout ce qui regarde la guerre, la navigation, la musique, la religion, les costumes civils et militaires des peuples anciens ; tous les attributs de leurs divinités, etc. » Ainsi que le précisait Mongez, l’ensemble se distinguait particulièrement par l’abondance des objets (coiffures et ajustements de femmes, costumes militaires…), plus de cent cinquante dessins de toutes les têtes mythologiques connues, ainsi que celles des personnages historiques des antiquités grecque, romaine et barbare, enfin la désignation des couleurs des draperies que portent les dieux et les héros dans les peintures antiques. Néanmoins, Mongez se contentait de rassembler ces monuments attestés par les antiquaires, sans s’engager dans les débats savants et sans ajouter à la masse des connaissances iconographiques.
Il n’avait pas achevé son Dictionnaire, qu’il entamait la composition d’une Galerie de Florence (1789-1807) commanditée par Philippe-Laurent de Joubert, baron de Sommières, trésorier des états du Languedoc et protecteur de nombreux artistes. Les gravures de l’ouvrage reproduisaient, d’après les dessins de Jean-Baptiste Wicar, élève de David, des tableaux, camées et bas-reliefs des collections du musée des Offices et du Palais Pitti. Mongez fut invité par David à en composer les commentaires. Comme Chiara Savettieri l’a noté dans une étude récente, l’agencement de l’ouvrage ne tenait aucun compte du nouvel aménagement des Offices qui s’organisait au cours de cette période dans une perspective historiciste inspirée de Johann Joachim Winckelmann et de Zanetti, soucieuse d’illustrer le développement chronologique de l’art toscan. Les livraisons de la Galerie présentent les œuvres sans considérations d’écoles ni d’époques. En revanche, les commentaires se signalent par leur concision et leur mépris de l’anecdote. Ils s’affranchissent des lourdeurs d’érudition superflue qui caractérisaient souvent ce genre d’exercice, pour aller droit à la qualité et aux caractères propres du style de chaque artiste, rendant justice au schématisme concerté des représentations spatiales à l’arrière-plan des bas-reliefs antiques ou s’attachant aux singularités de tel tableau de Salvator Rosa ou de Rembrandt.
En 1796, lors de la création de l’Institut, Mongez rejoignit la classe de littérature et des beaux-arts. Inscrit dans la section des antiquités et monuments, il fut l’un des rares au cours de cette première période à envisager les monuments – et spécialement les monuments figurés – comme objets d’étude, quand les autres communications reposaient pour la plupart sur des dépouillements de textes. Dans un mémoire daté de l’an IV, il compare les grands travaux édilitaires de la Rome impériale à ceux de son temps, indique comment les Romains les finançaient sans écraser d’impôts les populations, traite des matériaux qu’ils employaient et recommande enfin aux architectes modernes quelques procédés antiques pour poser des fondations en terrain humide. De fait, en cette même année 1896, son Mémoire sur la réunion des littérateurs et des artistes dans l’Institut français exposait le programme général d’une collaboration des érudits et des artistes. « Principe de l’imitation » et « culte de la mémoire » sont les fondements communs que Mongez retrouve à l’origine de la pratique des arts et de l’étude des antiquités. Les peintres ont besoin des historiens pour donner à leurs œuvres « un caractère de vérité », ils ont besoin des antiquaires pour « rendre complète l’illusion qui transporte les spectateurs à Mycènes, dans Argos ou sur les bords hospitaliers de la Tauride ». Antiquaires et architectes pourront fixer ensemble un judicieux emploi des ordres, tandis que les artistes « propageront l’étude des antiques » et le retour au modèle. En somme, les deux groupes rechercheront ensemble dans les arts des anciens ce qui mérite de revivre, « dans les usages de leurs républiques ce qui peut être adopté » : il s’agit de « réaliser », de « mettre en action » cette « école d’Athènes où le génie de Raphaël réunissait, il y a deux siècles, les sciences, les lettres et les arts ». Il se peut, comme le suggère Édouard Pommier, qu’un tel appel à l’idéal de la réunion des arts ait marqué le moment où le thème de la « résurgence de la tradition » se substituait dans les esprits à celui de la « régénération » révolutionnaire. Mongez était convaincu que sa connaissance de l’iconographie ancienne pouvait contribuer au perfectionnement du goût, ce dont témoignent ses Observations (1803) sur l’abus de quelques figures allégoriques employées en peinture et en sculpture. Plus généralement, il n’a jamais perdu de vue les possibilités d’actualisation qu’offrait l’étude du patrimoine antique. Dans son Tableau de l’état des progrès de la science de l’Antiquité depuis 1789 (1802), il loue le XVIIIe siècle d’avoir fait la recherche « des objets, des arts, des procédés qui pouvaient être utilisés avec avantage » et servir notamment de modèles aux manufactures modernes.
Au cours des années 1795-1815, son activité pour tout ce qui regarde l’archéologie est remarquable : examen d’un rapport sur les fouilles de Vron, près d’Abbeville, étude de poteries rouges à décor dont la fabrique avait été découverte près de Clermont, mémoire sur les cercueils de pierre retrouvés dans diverses régions de France, etc. À propos d’une épée exhumée près de Corbie, il développe la question de l’emploi et des techniques du bronze. D’autres mémoires portent sur les instruments aratoires, sur l’étain des Romains, les gladiateurs, les masques antiques ou l’emploi du chanvre au Moyen Âge. Surtout, il expose régulièrement le résultat de ses travaux sur l’habillement des anciens, voulant poursuivre pour le mener à bien le projet qu’avait conçu Saumaise d’un traité De re vestiaria veterum. Le dossier K11 des archives de l’Institut rassemble un grand nombre de manuscrits relatifs aux vêtements des Perses, au Pallium des Grecs, au costume des Cyniques. Qu’il décrive les techniques de tissage, l’emploi des matières, l’art des motifs, ou qu’il traite de la coiffure en relation avec l’état des mœurs et des pratiques religieuses, toujours il prend soin de confronter les sources littéraires et figuratives. Sa femme l’assistait dans ce travail, elle mit probablement la main aux nombreux dessins qui accompagnent ses notes (ornements de manteaux persans, croquis du pallium avec ses mesures précises, figure d’une tunique égyptienne retrouvée en 1801 dans les fouilles de Saqqara) et on conçoit bien l’intérêt que pouvait prendre à de telles recherches une artiste qui s’illustrait alors dans la peinture d’Histoire.
Dans le même temps, Mongez poursuivait ses travaux de numismate et d’iconographe. Il étudie la statue antique dite du Silence, critique les conclusions de Winckelmann sur le Gladiateur Borghèse, interprète la figure des deux mains ouvertes qui accompagnent certaines épitaphes grecques et romaines. La réputation qu’il s’était acquise en ce domaine lui valut d’être désigné pour poursuivre la grande Iconographie ancienne qu’Ennio Quirino Visconti avait laissée inachevée. On sait quel était le prestige de ce membre de l’Institut, dont l’autorité rayonnait sur toute l’Europe savante, et (depuis les travaux de Daniela Gallo) quelle fut l’importance de son rôle dans l’organisation de la galerie des antiques du musée central des Arts, puis musée Napoléon. Les trois énormes volumes de l’Iconographie grecque, depuis Homère jusqu’aux derniers Ptolémées, avaient paru de son vivant, suivis du premier volume de l’Iconographie romaine. Visconti était mort en 1818, avant d’avoir pu entreprendre la série des Julio-Claudiens. Il revenait à Mongez d’achever sous la Restauration ce monument commandité par l’Empire. Les trois livres qu’il publia entre 1821 et 1826 respectaient le programme formulé par son prédécesseur dans son Discours préliminaire : constituer la collection de tous les hommes illustres de l’Antiquité et faire progresser la connaissance de l’iconographie ancienne, en « justifiant par des preuves, ou du moins par des conjectures probables » les dénominations des monuments. Il suivait pareillement son plan d’ensemble. Au portrait de chaque empereur répond le récit détaillé de son règne, puis la description des œuvres, sculptures, camées, monnaies qui le représentent, suivie d’un examen critique des sources antiques et modernes. L’ouvrage s’achève au partage de l’Empire, après la mort de Constantin.
Au reste, Mongez ne fut pas seulement un homme de cabinet, et comme le constatait Charles-Antoine Walckenaer, son biographe de l’Institut, il sut se rendre utile à tous les gouvernements. Le Girondin Clavière l’avait appelé à la commission administrative des monnaies peu avant la chute du trône. Le Directoire le mit à la tête de cette administration, puis Bonaparte le nomma pour un temps au Tribunat avant de lui rendre sa place. Mongez se chargea notamment d’appliquer à la République italienne le système bimétallique du Franc germinal. Écarté de nouveau par Villèle, en 1827, il ne retrouva ses fonctions qu’en 1830, à l’âge de quatre-vingt-trois ans. En 1816, il avait été rayé de la liste des Académiciens. Mais l’Académie avait refusé par trois fois de lui donner un successeur et l’avait réintégré peu après à l’unanimité. Dans les dernières années de sa vie, Mongez se consacra à l’étude des Bollandistes. On peut encore consulter aux archives de l’Institut l’épais dossier de ses extraits des Vies de saints, dont il relevait et traduisait tous les passages qui pouvaient intéresser l’archéologie et l’histoire.
Monica Preti-Hamard
Principales publications
Ouvrages et catalogues d’expositions
- Histoire de la reine Marguerite de Valois, première femme du roi Henri. Paris : Ruault, 1777, In-8 °, IV-424 p.
- Mémoires sur différents sujets de littérature [« Histoire des hôpitaux » ; « Sur les lacrymatoires » ; « Sur le colosse de Rhodes » ; « Sur les moyens d’étendre le goût de la littérature française en Allemagne »]. Paris : Lottin-le-Jeune, 1780, In-8°.
- Mémoire sur des cygnes qui chantent [Lu les 19 et 29 juillet 1783 à l’Académie des sciences et à l’Académie des belles-lettres. Imprimé aussi dans le XXIIIe volume du Journal de physique de l’abbé Rozier et inséré in extenso dans l’Encyclopédique méthodique]. Paris : rue et hôtel Serpente, 1783. In-8°.
- Encyclopédie méthodique. Antiquités, mythologie, diplomatique des chartres (sic) et chronologie. Paris : Panckoucke ; H. Agasse, 1786-1804, 6 t., 8 vol., In-4°.
- Tableaux, statues, bas-reliefs et camées de la Galerie de Florence et du palais Pitti, dessinés par M. Wicar, gravés sous la direction de M. Lacombe, avec des explications par M. Mongez l’aîné. Paris : chez Lacombe, etc., 1789-1807, 4 vol. gr. in-fol., pl.
- Vie privée du cardinal Dubois, premier ministre, archevêque de Cambrai, etc. Londres, 1789, In-8°, 389 p., portrait gr.
- Fables de La Fontaine, avec des notes grammaticales, mythologiques, etc., par Mongez, [la Vie de La Fontaine, par M. de Montenault et l’article intitulé « Fabuliste » composé par le chevalier de Jaucourt et tiré de l’Encyclopédie]. Paris : Agasse, an V (1797), 2 t., 1 vol., in-12°.
- Réflexions sur l’abus de quelques figures allégoriques employées en peinture et en sculpture. Paris : Vve Panckoucke, an IX, In-8°.
- Considérations générales sur les monnaies, par Mongez, lues à la 2e classe de l’Institut national, le 17 germinal an IV… suivies d’une notice sur les monnaies, par Dibbarart. Paris, an IV (1796).
- Iconographie romaine [Iconographie ancienne, ou Recueil des portraits authentiques des empereurs, rois, hommes illustres de l’Antiquité]. T. I. par le chevalier E. Q. Visconti, ; T. II-IV par A. Mongez. Paris : impr. de P. Didot l’aîné, 1817-1829, 4 vol., in-4° + 1 atlas gr. in-fol.
Mémoires académiques
De la très vaste bibliographie académique de Mongez, nous ne citons qu’un choix des travaux qui intéressent directement l’histoire ancienne. Un grand nombre de mémoires, restés manuscrits, se trouvent aux archives de l’Institut de France.
- « Mémoire sur la réunion des artistes et des littérateurs, lu à la 3e classe de l’Institut, le 13 Nivôse an IV (3 janvier 1796) », dans Mémoires de l’Institut national des sciences et des arts, littérature et beaux-arts, t. II (Fructidor an VII), p. 1-17 ; publié aussi par extrait dans Mercure de France, 9 mai 1796, p. 69-80.
- « Mémoire sur les costumes des Perses, lu le 3 Prairial an VII », ibid., t. IV (Vendémiaire an XI), p. 1-100.
- « Mémoire sur l’emploi du chanvre dans l’antiquité, lu en Fructidor an IX, ibid., t. V (Fructidor an XII, 1804), p. 457-477.
- « Second mémoire sur le bronze antique et sur une épée faite de cet alliage, lu le 8 Frimaire an X », Ibid., t. V, p. 496-516.
- « Mémoire sur l’épée gauloise et sur l’aciérie des anciens, lu le 22 Prairial an X », Ibid., t. V, p. 517-554.
- « Mémoire sur les travaux publics des Romains comparés à ceux des modernes, lu le 23 Ventôse an V », Ibid., t. I (Thérmidor an VI), p. 492-536.
- « Mémoire sur les gladiateurs et les statues antiques désignées sous le nom de gladiateurs, lu le 23 Ventôse an VI », Ibid., t. II (Fructidor an VII), p. 423-468.
- « Mémoire sur la statue antique connue sous le nom de Silence, lu le 28 Ventôse an IX », Ibid., t. V, p. 150-166.
- « Mémoire sur les charrues des anciens, lu en Nivôse an X », dans Mémoires de l’Institut Royal de France, classe d’histoire et de littérature ancienne, t. II (1815), p. 616-665.
- « Mémoire sur les instruments aratoires des anciens, lu le 18 Germinal an XI », Ibid., t. III (1818), p. 1-73.
- « Recherches sur les habillements des anciens, suivies d’un Mémoire sur les matières des habillements et sur le travail de ces matières, lu le 26 janvier 1810 », Ibid., t. IV (1818), p. 222-314.
- « Mémoire sur la lecture du VIe livre de L’Enéide, faite par Virgile devant Auguste et Octavie », imprimé par extrait dans le Moniteur du 10 août 1819.
- « Mémoires sur l’art du monnayage chez les anciens et chez les modernes : 1er mémoire : des métaux employés pour fabriquer les monnaies ; 2e mémoire : procédés employés par les monétaires ; 3e mémoire : sur les médailles antiques de plomb ; 4e mémoire : sur l’emploi du fer dans la fabrication des monnaies antiques ; 5e mémoire : sur des médailles romaines d’un volume extraordinaire », Paris, 1829.
Bibliographie critique sélective
- Daunou, Pierre-Claude-François. – Funérailles de M. Mongez. Discours de M. Daunou, président de l’Académie, prononcé aux funérailles de M. Mongez, le 1er août 1835. Paris : impr. de F. Didot frères, [s. d.], In-4°.
- Walckenaer Charles Antoine (baron). – Notice historique sur la vie et les ouvrages de M. Mongez par M. Walckenaer, secrétaire perpétuel de l’académie des inscriptions et belles-lettres, lue à la séance publique de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, du 17 août 1849. Paris : impr. de F. Didot frères, 1849, In-4°, 26 p.
- Franqueville (comte de). – Le Premier Siècle de l’Institut de France 25 octobre 1795-25 octobre 1895. Paris : J. Rothschild éditeur, 1895, 2 vol., 460 et 484 p., vol. I, p. 84-85.
- Michaud Louis-Gabriel. – Biographie universelle ancienne et moderne… t. XXVIII. Paris : C. Desplayes, 1858, ad vocem.
- Dussaud René – La Nouvelle Académie des inscriptions et belles-lettres, 1795-1914. Paris : P. Geuthner ; Laval : impr. de Barnéoud frères, 1946-1947, 2 vol. gr. in-fol., vol. I, p. 7, 21, 31, 38, 63-70, 72, 74-79, 81, 96, 105, 117, 119, 120, 122, 129, 246.
- Le Cabinet des curiosités de la bibliothèque Sainte-Geneviève : [catalogue de l’exposition], Paris, Réserve de la bibliothèque Sainte-Geneviève, 21 août – 30 septembre 1989. Paris : bibliothèque Sainte-Geneviève, 1989, p. 147-148.
- Pommier Édouard. – « J. J. Taillasson : “Observations sur quelques grands peintres” ». In Seicento : la peinture italienne du XVII siècle et la France : Paris, rencontres de l’École du Louvre, septembre 1990. Paris : La Documentation Française, 1990, p. 273-289 (« Rencontres de l’École du Louvre »).
- Pommier Édouard. – L’Art de la liberté : doctrines et débats de la Révolution française. Paris : Gallimard, 1991, p. 255-257.
- Sarmant Thierry. – Le Cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale : 1661-1848. Paris : École des chartes, 1994, p. 200, 208, 227, 251.
- Delmas Catherine. – Monnaie des médailles sous la direction de Vivant Denon (1802-1815), thèse de l’École nationale des chartres, 1996, p. 149, 154.
- Pommier Édouard. – « Le Goût de la République ». In Ideologie e patrimonio storico-culturale nell’età rivoluzionaria e napoleonica. A proposito del trattato di Tolentino : actes de colloque, Tolentino 1997. Rome : Pubblicazione degli Archivi di Stato : Saggi ; 55, 2000, p. 7-38.
- Cler Fabien. – « Les Mongez ». Sine Dolo. Pour une société de gens d’histoire, n° 6, décembre 2004, p. 293-352.
- Gallo Daniela. – « L’ideologia imperiale e l’“iconographie ancienne” di Ennio Quirino Visconti ». In Ideologie e patrimonio storico-culturale nell’età rivoluzionaria e napoleonica. A proposito del trattato di Tolentino : actes de colloque, Tolentino, 1997. Rome : Pubblicazione degli Archivi di Stato : Saggi ; 55, 2000, p. 55-77.
- Savettieri Chiara. – « La Galerie de Florence de Jean-Baptiste Wicar et Antoine Mongez : tradition et originalité à l’époque de la Révolution ». In Maria Teresa Caracciolo,éd., Jean-Baptiste Wicar (1762-1834) et son temps. Histoire des idées et histoire de l’art de la Révolution française à la Restauration : actes de colloque, Lille, 2004. Lille : Presses du Septentrion, 2007, p. 123-153.
Sources identifiées
Paris, archives de l’Institut de France
- Archives de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, K 1-17 ; C 60
- Dossiers K1 à K5 : manuscrits de A. Mongez sur divers sujet d’érudition, dont la plupart concernent l’archéologie. Classés par thèmes et par ordre alphabétique, ils sont souvent accompagnés de dessins. Certains de ces manuscrits ont été publiés dans les Mémoires de l’Institut
- Dossiers K6 à K7 : notes de travail de A. Mongez prises sur les ouvrages des Bollandistes relatifs à l’histoire, à la géographie et à l’archéologie
- Dossier K8 : lettres et papiers relatifs à la poursuite de l’Iconographie romaine d’Ennio Quirino Visconti
- Dossiers K9 et K10 : notes de travail sur cet ouvrage. Ils contiennent le manuscrit du tome II ainsi que le double du texte des tomes II, III, et IV
- Dossiers K11 à K14 : papiers relatifs aux recherches sur les « costumes » des Anciens, en partie publiés dans le Dictionnaire d’antiquités. Ils contiennent des notes, des brouillons et de nombreux dessins (K11), le manuscrit pour les p. 1-495 (K13) et le manuscrit pour les p. 496-1006 (K14)
- Dossier K15 : lettres et dossiers adressés à A. Mongez par Antoine Artaud (1767-1838), directeur du musée de Lyon (1801)
— ** K16 : correspondance scientifique de A. Mongez avec Traullée (Albertville 1803-1822) ; Saint-Armand (Agen) ; Thiebaut (Paris 1803-1805) ; Revers (Normandie 1812-1827) ; Jourdan (Luxembourg 1812) ; Girault (Dijon 1820) ; Fourier ; Foulques (Limoges 1827) ; Julia de Fontenelle (Moncontour 1829) ; Flacheron (Lyon 1807-1820) ; Louis Fauvel (Athènes 1805-1811) ; Louis Dutens (Florence 1780-1782) ; Douglas (1802) ; De Murr ; Cochart (Lyon 1796-1821) ; Chaudruc de Crazanne
- Dossier K17 : contient la lettre de donation des papiers Mongez par A. Levol, neveu et légataire de Mme veuve Mongez, datée 27 juillet 1785, la notice historique sur la vie et les ouvrages d’A. Mongez par le baron Charles Walkenaer ainsi que diverses notes de travail dont des extraits du Moniteur et de ses travaux littéraires
- C 60 : Mémoires et papiers des membres de l’Académie : Antoine Mongez
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Manuscrits occidentaux
- Ms. fr. 9458, fol. 331 : Papiers Bon-Joseph Dacier. « Tableau général de l’État des progrès de la science de l’Antiquité depuis 1789 jusqu’au premier Vendem. an X (1802) » (il s’agit probablement d’une copie de Dacier)
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Monnaies, médailles et antiques
- Rés. ms. 10009 STG F° : « Catalogue des médaillons et médailles antiques du Cabinet de l’abbaye royale de Sainte-Geneviève de tous métaux et de toutes grandeurs… fait par A. Mongez, chanoine régulier, garde des antiques et du cabinet d’histoire naturelle de l’abbaye de Sainte-Geneviève, des académies de Lyon, Dijon et Rouen, MDCCLXXXIII ». 1783, 1086 p. 345 x 220 mm. Reliure de basane aux armes de Sainte-Geneviève, XVIIIe s., refaite
Iconographie
Paris, bibliothèque de l’Institut de France
- Jules Boilly, Portrait d’Antoine Mongez, lithographie, 1820, dans Recueil de portraits de personnages célèbres faisant partie des quatre différentes classes académiques de l’Institut, lithographiés par Boilly fils, publiés par Blaisot. Paris : Marchand, s. d. In-4° (n° 111)
Paris, musée du Louvre
- David Jacques Louis, Portrait d’Antoine Mongez et de son épouse Marie-Joséphine-Angélique, née Levol]. 1812. Daté, signé, inscription : « Amicos Antonium Mongez et Angelicam Uxorem Amicus Ludovicus David. Anno MDCCCXII (S.D.h.m.) », huile sur bois, 74 x 87 cm., inv. MI 145.