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Sous les coupoles de la salle Labrouste
La salle de lecture, conçue en 1859 par Henri Labrouste pour la Bibliothèque impériale, est couverte de neuf coupoles blanches ceinturées de frises roses. Le titre de ce blog, « Sous les coupoles », évoque cet élément caractéristique de l’architecture de la salle Labrouste, dans laquelle la bibliothèque de l’INHA emménagera en 2016.
Coiffer la salle de lecture
Lorsqu’il conçoit, au milieu des années 1860, la grande salle de lecture de la bibliothèque impériale, Henri Labrouste opte pour un plan carré, bien différent de celui qu’il a choisi précédemment pour la bibliothèque Sainte Geneviève. Avec ses 1370 mètres carrés, la salle sera monumentale : comment couvrir un tel volume tout en lui conférant une belle luminosité ? Les trois baies vitrées en façade, qui donnent sur la cour, ne fourniront pas aux lecteurs la lumière suffisante, et il est impensable, pour des raisons de sécurité, de recourir à l’éclairage artificiel : la plus grande crainte est alors l’incendie.
Dans un premier temps, Labrouste envisage de coiffer la salle d’une immense verrière. Cependant, il apparaît vite qu’une telle solution engendrerait des désagréments pour les lecteurs : leur ombre, les jours de beau temps se projetterait sur les ouvrages qu’ils consultent ! Après maintes réflexions, Labrouste adopte une solution beaucoup plus ingénieuse : un jeu de neuf coupoles sur pendentifs, soutenues par de fines colonnes de fonte.
Salle Labrouste, janvier 2015. Cliché Johanna Daniel
« Un mécanisme dans son boîtier »
L’architecture de la salle fonctionne comme « le mécanisme d’une montre dans son boitier » : la structure de métal qui soutient les coupoles et le toit est totalement indépendante de la maçonnerie. En vérité, la salle de lecture bénéficie d’une double couverture : au-dessus des coupoles, s’élève une immense verrière supportée par une charpente métallique.
Henri Labrouste, plan partiel des toitures, dessin, 1868, Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France
En leur centre, les coupoles sont percées d’un oculus : la lumière se reflète sur les carreaux de faïences blanches, assurant ainsi un éclairage diffus et homogène. Seul l’hémicycle, au fond de la salle est couvert d’un plafond vitré, qui demeure cependant invisible depuis les places des lecteurs.
Henri Labrouste, Coupoles (plan du vitrage, avec détails constructifs et ébauche d’une vue du lanternon), dessin, 1868, Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France
Surprenantes inspirations
Le parti-pris architectural de Labrouste est novateur et puise dans des références éclectiques et pour le moins surprenantes. Dans le catalogue de l’exposition qui s’est tenue en 2012 à la Cité de l’architecture, Marc Le Cœur dévoilait une des sources d’inspirations de l’architecte : les dessous féminins ! Ce sont en effet les cages à cerceaux des crinolines, à la mode au milieu des années 1850 qui inspirèrent à Labrouste la structure de métal formant les coupoles. L’habillement féminin avait lui-même bénéficié, quelques années plus tôt, des progrès de l’architecture métallique. Malicieusement, Labrouste rend hommage à ces dessous si inspirants : les coupoles blanches ceinturées de rose ne rappellent-elles pas les jupons féminins et leurs rubans ?
Illustration humoristique de la mode des crinolines : Encore une crinoline !, (détail), lithographie de la fabrique d’estampes de Grangel, à Metz, après 1850, Source : Gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France
Retrouver l’éclat des coupoles
Durant les travaux de restauration, les coupoles ont été nettoyées : les carreaux de faïence ont retrouvé leur éclatante blancheur, soulignée par les chatoyantes frises ornementales roses bordées d’aluminium. Les oculi, débarrassés de leur crasse, diffusent à nouveau une belle lumière, propice au travail. Ainsi rendus à la clarté, les volumes de la salle de lecture baignent dans la lumière : on y verrait presque l’air circuler !
Salle Labrouste, janvier 2015. Cliché Johanna Daniel
Johanna Daniel, service du Patrimoine
En savoir plus
- Catalogue de l’exposition de la Cité de l’architecture et du patrimoine en 2012 : Caroline Bélier, Barry Bergdoll, Marc Le Cœur (dir.), Labrouste (1801-1875), architecte. La structure mise en lumière, Paris, Nicolas Chaudun, 2012.
- Jean-Michel Leniaud (dir.), Des Palais pour les livres. Labrouste, Sainte-Geneviève et les bibliothèques, Paris, Maisonneuve & Larose, Bibliothèque Sainte-Geneviève, 2000.