Hommage à Frank Popper

© Jean-Louis Boissier

L’INHA rend hommage au critique et théoricien de l’art contemporain Frank Popper, pionnier de la réflexion sur la relation entre art et technologie, décédé le 12 juillet dernier à Lugano (Suisse) à l’âge de 102 ans.

Né le 17 avril 1918 à Prague, Frank Popper a successivement vécu à Vienne, Londres, Rome et Paris où il s’établit définitivement en 1955. Il obtient en 1966 à la Faculté des Lettres et des Sciences humaines de l’université de Paris-Sorbonne un doctorat d’Université en Esthétique avec une thèse sur « L’image du mouvement dans les arts plastiques depuis 1860 » puis, en 1970, un doctorat d’État intitulé « L’art cinétique ». Dès 1962, il fait partie de l’Institut d’Esthétique et, au début de 1969, il est parmi les fondateurs du département Art de l’université de Paris VIII – Vincennes où il dirige le département Arts plastiques de 1970 à 1983. En 1976, il est nommé professeur titulaire d’Esthétique et Sciences de l’Art et, en 1985, professeur émérite.

Sa réflexion sur l’art cinétique, amorcée dès 1963, est élaborée dans plusieurs ouvrages publiés simultanément dans plusieurs langues, dont Naissance de l’art cinétique (Paris/Londres/Greenwich, Conn., 1967-68) et Die kinetische Kunst (Cologne, 1975). Il organise également des expositions pionnières marquantes, telle Kunst-Licht-Kunst au Stedelijk Van Abbemuseum à Eindhoven (1966) et Lumière et Mouvement au Musée d’art moderne de la Ville de Paris (1967.

Sans se contenter d’une seule étiquette, Frank Popper interroge ensuite la convergence entre les notions d’environnement et de participation du spectateur dans les arts depuis le milieu des années 1960. Sa réflexion sur les relations entre l’artiste, le théoricien et le spectateur est au cœur de son ouvrage Art, Action et Participation : l’artiste et la créativité aujourd’hui (1re édition à Paris, Londres et New York en 1975), réédité et traduit à de nombreuses reprises. C’est aussi dans ce cadre de pensée qu’il conçoit pour la 6e édition de la Biennale internationale des jeunes artistes à Paris en 1969 un « Atelier du spectateur » expérimental fondé sur la participation non contrôlée du public, qui est interdit le jour même de son vernissage par les forces de l’ordre.

Toujours à l’affût des relations entre art contemporain et technologie, Frank Popper s’intéresse aux arts technoscientifiques et aux arts de l’interactivité, à l’utilisation artistique du laser, de l’holographie, de la vidéo, de la télécommunication et de l’image numérique. En témoignent le catalogue de l’exposition Electra : l’Électricité et l’électronique dans l’art au XXe siècle (Musée d’art moderne de la Ville de Paris, 1983-84) ainsi que son ouvrage L’Art à l’âge électronique (Paris/Londres/New York, 1993).

Dans les années 1990, Frank Popper publie un ouvrage rétrospectif sur sa vie, sur l’art et la critique d’art, Réflexions sur l’exil, l’art et l’Europe : entretiens avec Aline Dallier (Paris, Klincksieck, 1998).

En 2008, à l’occasion de la parution de ses livres From Technological to Virtual Art (New York, MIT, 2006) et Écrire sur l’art : de l’art optique à l’art virtuel (Paris, L’Harmattan, 2007), l’INHA organise une rencontre avec Frank Popper.  Plus récemment, son projet pour l’Atelier du spectateur et sa théorie de la participation ont fait l’objet d’un séminaire du programme de recherche « 1959-1985, au prisme de la Biennale de Paris ».

L’INHA conserve également, aux Archives de la critique d’art à Rennes, les fonds d’archives de Frank Popper et de son épouse, la critique d’art Aline Dallier-Popper (1927-2020)..