Vers la science de l’art : l’esthétique scientifique en France, 1857-1937

30 novembre-1er décembre 2011
Auditorium de la Galerie Colbert
2, rue Vivienne
75002 Paris


Accès : 6 rue des Petits-Champs



Colloque international



La question d'une « science du beau » fait l'objet d'un concours organisé en 1857 par l'Académie des Sciences morales et politiques. Remporté par Charles Lévêque (La Science du Beau, 1861), il signale l'émergence d'un mouvement de fond affectant la philosophie et les arts, résultat de la tension forte que recouvre la notion d'esthétique depuis le XVIIIe siècle, entre le beau et, précisément, l'aiesthesis : la sensation, au sens physiologique. Ce mouvement est ainsi celui qui voit la progressive émancipation de l'esthétique hors de la métaphysique : méfiante à l'égard des postulats kantiens et spiritualistes, l'esthétique scientifique s'est conçue tour à tour ou simultanément comme une physique et une mathématique, comme une physiologie et une psychologie, dans tous les cas comme une esthétique « d'en bas » (Fechner). Elle n'a pas cherché le beau dans son essence mais dans ses moyens et dans ses effets, valorisant, autant que l'œuvre, l'observateur dans son ancrage corporel, et mettant en avant l'expression plutôt que l'imitation. Son projet a donc pour toile de fond les développements de la psychologie expérimentale, ceux d'une science de la sensibilité et des émotions, d'une psychologie du mouvement et de l'action, aussi bien que les réflexions sur le formalisme, ou encore sur la sympathie esthétique ou l'empathie. Les termes de ce débat, issus de l'esthétique germanique, ont été peu à peu accomodés au milieu français, jusqu'à Charles Lalo et Victor Basch, premier titulaire en France d'une « chaire d'esthétique et de science de l'art », et organisateur en 1937 du second Congrès international d'esthétique où fut explicitement posée la question de la possibilité de l'esthétique comme science. Articulée au système des arts dès les années 1860, cette esthétique rationnelle est en outre le lieu d'un dialogue soutenu entre la philosophie et les pratiques artistiques, dont la fécondité a déjà été appréhendée mais n'a pas encore fait l'objet de travaux exhaustifs. Au-delà du partage classique entre académisme et mouvements novateurs, l'idée d'une science de l'art irrigue en effet l'enseignement des beaux-arts comme elle accompagne certains développements artistiques de premier ordre, de la théorie néo-impressionniste à celle des débuts de l'abstraction, des adeptes de l'arabesque art nouveau aux réformateurs des arts du geste et de la danse, de la géométrie sensible des puristes de l'Esprit Nouveau aux zélateurs des synesthésies et à ceux de l'œuvre d'art totale.

Réunissant philosophes de l'esthétique et historiens de l'art, entre passion des idées et souci des œuvres, le colloque international « Vers la science de l'art : l'esthétique scientifique en France, 1857-1937 » forme le projet de remettre en lumière un corpus d'auteurs et de textes encore trop négligés et d'analyser le contexte de la culture scientifique et visuelle dans lequel ont émergé certaines des œuvres les plus significatives de la période envisagée.



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